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Glossaire - Biographies
le Déclin - l'Abbaye - Chronologie - les Abbés
Photos - Intérieur

- l'Abbaye de Hautecombe


- Presentation
* Diocèse : Archidiocèse de Chambéry, Maurienne.
   et Tarentaise.
* Patronage : Notre-Dame, Ste Irène, St André.
* Numéro d'ordre : (LXXXV (85)1.
* Fondation : (1101).
* Début construction : (1125)-(1824).
* Fin construction : (1159)-(1843).
* Origine religieuse : Basiliens.
* Cistercien depuis : (1125).
* Dissolution : (1790-(1826).
* Abbaye-mère : Clairvaux, Consolata, Sénanque, Solesmes.
* Lignée de : Abbaye de Clairvaux.
* Abbayes-filles : 90-Fossanova, 88-Zaraka, lsova 567 - Pétra.
* Congrégation : Basiliens, Cisterciens, Bénédictins, Chemin Neuf.
* Style : Cistercien, Gothique Troubadour.
* Protection : Classée Monument Historique (1875).

Situation.
* Pays : France.
* Province : Savoie.
* Région : Auvergne, Rhône Alpes.
* Département : Savoie.
* Commune : St Pierre de Curtille.

- Historique

L'abbaye Royale de Hautecombe, sise sur un éperon de la côte sauvage de la rive Occidentale du lac du Bourget, au pied du mont de la Charvaz, est située sur le territoire de la Commune de St Pierre de Curtille, à 5 km du centre du bourg et à moins d'1 kilomètre de la Commune d'Ontex. Elle se trouve à environ 10 km au Nord-Ouest d'Aix les Bains, à 15 km au Nord du Bourget du Lac, 25 km au Nord de Chambéry, et à 45 km au Sud-Ouest d'Annecy. L'abbaye de Hautecombe est la seule Abbaye Cistercienne érigée à proximité immédiate d'un lac naturel.

L'Abbaye a été fondée en (1125) par Amédée de Lausanne, avec l'aide du Comte Amédée III de Savoie et l'appui de Bernard de Clairvaux, et construite durant le (XIIème siècle) par des Moines Cisterciens. Elle est particulièrement connue pour être la nécropole de la Maison de Savoie Comtes de Savoie, leur famille, et quelques membres de la famille Ducale de Savoie, puis de quelques uns des Rois et Reines d'Italie.

Après une période active et prospère jusqu'au début du (XVeme siècle), l'abbaye, comme nombre d'autres maisons religieuses à cette époque, tombe sous le régime de la Commende, "gestion des biens matériels par une personne extérieure à l'abbaye", et la piété de la vie religieuse s'en ressent fortement. Les vocations se font graduellement moins nombreuses jusqu'au (XVIIIème siècle), et la vocation de nécropole est complètement perdue. La Révolution Française qui agrège la Savoie, indépendante, à la France sous le nom de département du Mont Blanc, chasse les rares derniers Moines et détruit une partie de l'édifice.

L'abbaye revient dans le Royaume de Sardaigne après le Congrès de Vienne au début du (XIXème siècle). Elle est alors reconstruite en style Baroque Troubadour par la volonté du Roi de Sardaigne, Charles Félix de Savoie (1765)-(1831) et de Marie Christine de Bourbon Siciles. Les travaux sont menés sous la conduite de l'architecte Ernesto Melano. L'abbaye est à nouveau confiée aux Cisterciens à partir de (1826), elle retrouve sa fonction de Nécropole des Souverains avec l'inhumation du Couple Royal.

L'annexion de la Savoie à la France de Napoléon III en (1860) ne modifie pas le régime de l'abbaye. Elle appartient à une fondation privée fondée par Charles Félix et dirigée par l'Abbé de la communauté religieuse qui occupe les lieux. Bien que relativement épargnée par la loi de séparation des Eglises et de l'Etat en (1905), l'abbaye fait face à une crise après la Première Guerre Mondiale, qui amène le remplacement des Cisterciens par des Moines Bénédictins de (1922) à (1992). A la Seconde Guerre Mondiale, Hautecombe héberge temporairement des religieux Polonais. Ceux ci sont arrêtés par la Gestapo dans l'enceinte de l'abbaye.

A la fin des années (1980), les Bénédictins décident de quitter l'abbaye de Hautecombe, devenue trop touristique. Ils partent pour l'abbaye N.D. de Ganagobie et demandent à la communauté du "Chemin Neuf" de venir les remplacer. Il accepte de s'y établir en (1992). Cette communauté s’inspire à la fois de la Spiritualité de St Ignace de Loyola et de l’expérience du renouveau Charismatique. Elle organise en particulier des sessions de formation Théologique.

- Avant Jésus Christ

Le site d'Hautecombe, avant notre ère, avait paru favorable à l'établissement d'une Cité Lacustre, édifiée à une époque imprécise, à quelques centaines de mètres au Sud de l'Abbaye. Cette cité était assez réduite, plus en tout cas que celles édifiées sur les autres rives plus favorables du lac du Bourget. Des restes en ont été découverts vers le (XIXème siècle), mentionnés par Laurent Rabut dans son 1er mémoire Les "habitations lacustres de la Savoie". Ils ont été datés d'entre (3842) et (3835) avant Jésus Christ. Le site de Hautecombe est classé depuis le 27 Juin (2011) au Patrimoine Mondial de l'Humanité sous le n°F-73-068. Le classement de l'UNESCO identifie le site de Hautecombe sous le n°1363-067, représentant un site de 2,03 hectares 160 × 60 mètres, complété par une zone tampon de 5,7 hectares, situé dans la baie Sud d'Hautecombe au Sud du vieux port. Le classement au patrimoine Mondial a par ailleurs amené un classement à l'inventaire des Monuments Historiques le 24 Octobre (2011). A la différence de l'Abbaye, qui est propriété de la fondation de Hautecombe, ce site est propriété de l'Etat.

- Notre Temps

Au Ier siècle de notre ère, un temple Gallo Romain dédié à Auguste se dressait à l'emplacement actuel de l'Abbaye. Une inscription en témoignait encore au (XIXème siècle), notée sur une auge de pierre :

* AUGVST SACRVM
* S C FIL VOLTIN SABINUS
* A Auguste, Sennius Sabinus, de la tribu Voltinia, fils de Caïus, a élevé ce temple. Ce nommé Caïus Sennius, surnommé Sabinus, Notable de la province sénatoriale de Vienne, est connu pour ses goûts fastueux et sa générosité, il exerçait la fonction de Préfet des ouvriers, à Genève "Genua", il avait érigé un temple en l'honneur de Mars Auguste, et d'autres dans le pays de l'Albanais.

- l'Oratoire

Au début du (XIIème siècle) en (1101) le prieuré de Hautecombe, est situé à Cessens dans le massif de la Chambotte, au lieu dit plateau de Paquinôt, au pied du Fornet, dans la vallée Sessine. Des Moines de l'abbaye d'Aulps, désirant embrasser la vie Erémitique, arrivèrent à un lieu, alors plein d'horreur et de solitude, appelé Hautecombe. Là, ils bâtirent un Oratoire et menèrent une vie sainte et solitaire, selon la règle de St Basile. Ce lieu, appelé Combe de Vandebert en (1126), Combe de Valper au (XVIème siècle), est aujourd'hui situé entre les hameaux des Granges et du Topy.

Le terrain est donné aux moines par Gauthier d'Aix à l'Abbé Varrin, vers (1121), mais après qu'ils sont déjà installés :

     "Au nom du Seigneur, moi, Gauterin, je donne à la Bienheureuse Marie des Alpes et au Seigneur Varrin, Abbé de cette église, pour le repos de mon âme, de celle de tous mes ancêtres et de mon fils Gauterin, une terre autrefois appelée vulgairement le Fornet et aujourd'hui la Combe, située dans le pays d'Albanais, sur la montagne où se trouve le château de Cessens. Rodolphe, du château de Faucigny, sa femme, son père, ses frères et ses fils ont approuvé cette donation"

Donation qui fut par ailleurs confirmée par Amédée III. De ce prieuré ne restaient à la fin du (XVIème siècle) qu'une partie de l'édifice encore debout, plusieurs autres vestiges des bâtiments, tels qu'un puits, un vase vinaire, et, dès le milieu du (XIXème siècle), aucun pan de mur encore debout.

- les Clunisiens

Le 21 Mars (1098), RobertMolesme et 21 Moines Clunisiens quittent Molesme pour aller fonder l'Abbaye de Cîteaux qui aboutit à la création de l'ordre Cistercien, promu notamment par Bernard de Clairvaux au début du (XIIème siècle). Cette observation plus exigeante de la règle de St Benoît remporte un franc succès et attire de nombreuses vocations. Bernard de Clairvaux, pour aller à Rome, appelé par Innocent II, est obligé de traverser les Alpes, notamment la Chambotte, et vient donc à rencontrer les Moines de Cessens. Il se méfie de la vie d'Ermite, plus susceptible de dérives que la vie en communauté, et conseille en conséquence aux Moines de Cessens une évolution de leur vocation. Sous son influence, St Guérin et les Moines de Hautecombe décident de se rattacher à l'ordre Cistercien, ce qui est fait le 14 Juin (1135). L'Abbaye rejoint la filiation de Clairvaux. L'emplacement, quoique relativement désert, est considéré par les Moines comme trop passant, leur mode de vie étant très retiré. Ils cherchent donc un lieu plus isolé. Suivant les conseils de St Bernard, qui revenait d'une tournée en Allemagne et en Italie, et après avoir eu la vision d'une lumière s'élevant de Cessens pour éclairer les roches de Charaïa, ils choisissent ce dernier emplacement pour leur nouvelle abbaye, qu'ils appellent également Hautecombe.

- Hautecombe

Claudius Blanchard, se fondant sur la donation faite par Amédée III à l'Abbé en place, Amédée de Lausanne, qui passe pour 1er Abbé de Hautecombe, estime que le transfert de l'ancien site de Cessens à l'actuel de Charaïa s'est effectué en (1125). On retrouve en effet cette date dans les documents historiques, et elle est généralement admise jusqu'au (XIXème siècle). Mais les études historiques depuis Claudius Blanchard s'accordent pour dire que le document a probablement été antidaté, sans doute par Samuel Guichenon. L'acte est plus vraisemblablement de (1139), puisque la donation est faite au nouveau prieur Amédée, successeur de Vivien. Ce dernier était encore Novice à Cîteaux en (1125). La donation est faite en ces termes :

    " Moi, Amédée, Comte de Savoie, avec le suffrage de mon épouse, je donne à Dieu et à la Bienheureuse Marie, à Amédée, Abbé d'Hautecombe, et à ses Frères du même lieu, tant présents que futurs, sans aucune restriction frauduleuse, la terre allodiale que j'ai ou que j'ai le droit d'avoir, sur la rive du lac de Châtillon, comprenant prés, champs, arbres fructifères et infructifères, etc., appelée autrefois Charaïa et Exendilles, aujourd'hui Château St Gilles, environ deux kilomètres au Nord de l'Abbaye et actuellement Hautecombe."

En réalité, les sites n'étaient pas déserts, Charaïa et Exendilles étaient 2 petits villages, particulièrement pauvres. La Chapelle de Charaïa s'élevait à l'emplacement de la Chapelle St André actuelle et daterait du (XIème siècle), cette Chapelle aurait repris des éléments, sarcophages datant du (VIIème siècle) ou du (VIIIème siècle). Les Moines construisent l'abbaye à Charaïa et une Grange à Exendilles. L'Abbaye étant à peu près dénuée de ressources, les Princes de Savoie tentent de lui en octroyer, notamment Humbert III, qui donne à Dieu et à Ste Marie de Hautecombe, pour le salut de son âme et de celle de ses ancêtres, 20 livres de poivre à prendre chaque année sur le péage de Suse le jour de la Fête de St André, et Sibaud II de Clermont, son Oncle. Une des raisons de la donation de Charaïa aux Moines est le désir qu'ils contrôlent pour le compte de la maison de Savoie la grande voie de communication que constituent le Lac du Bourget et son prolongement du canal de Savières. Le nouveau site d'implantation était tellement difficile d'accès que la 1ère église n'était accessible que par l'eau.

Une des caractéristiques notables d'Humbert III est sa piété et son attirance vers le mode de vie Monastique. Après le décès de sa t3ème épouse, Clémence de Zähringen, il veut faire voeu monastique, mais comme il n'a pas de descendance, ses sujets lui demandent de se remarier. Après de longues tergiversations, il épouse donc Béatrice de Vienne, dont il a un fils, Thomas, qui est son héritier sur le trône de Savoie. Il aurait pris l'habit monastique peu avant sa mort, survenue à Hautecombe ou à Chambéry le 4 Mai (†1189).

- Moyen Age

La prospérité de la nouvelle Abbaye est précoce, il semble que l'église Abbatiale était en voie d'achèvement en (1153) et l'essentiel des bâtiments déjà construit en (1159), à tel point que St Bernard, surpris de cet accroissement, aurait prononcé ces paroles fatidiques : "Altacumba, nimis alta cades" - Hautecombe, tu est trop prospère, le jour de ta chute arrivera". Cependant, il semble évident à Romain Clair que ces paroles ont été attribuées à Bernard a posteriori. Quoi qu'il en soit, les travaux de l'église Abbatiale commencent très probablement dès (1139) ou (1140), et sont certainement achevés à la mort de St Bernard (†1153), ce qui correspond à une moyenne très raisonnable parmi les églises Cisterciennes d'époque.

La croissance de la nouvelle fondation est telle que, dès (1135), l'Abbaye de Fossanova, jusqu'alors Bénédictine, s'affilie à celle de Hautecombe, qui y envoie de nombreux Moines pour constituer ce qui est alors, sinon la 1ère fondation Cistercienne en Italie, du moins la 1ère de la filiation de Clairvaux. 60 ans plus tard, et à l'occasion des Croisades qui offrent de nouvelles possibilités d'évangélisation en Orient, l'Abbaye de Hautecombe envoie des Moines en Achaïe, Ils fondent l'abbaye de Zaraka et celle d'Isova, plus à l'Est encore, à l'occasion de la 4ème Croisade, les religieux de Hautecombe fondent l'Abbaye St Ange de Pétra en (1214). Dans les 2 cas, cette aventure Orientale dure peu de temps les Byzantins chassent les croisés de Constantinople en (1261), détruisent l'abbaye d'Isova en (1263) et l'abbaye de Zaraka est fermée vers (1275).

- Donations

A ses débuts, l'Abbaye n'est constitée que de Charaïa, 30 hectares donnés par Amédée III. Ces possessions, s'accroissent rapidement, principalement par des Dons. En (1125), parmi ses bienfaiteurs, Bernard de Chevelu. Les terres de l'abbaye se trouvent en Chautagne, sur les rives du Lac du Bourget, dans le massif des Bauges, dans l'Albanais, le Bugey, mais des terres situées très loin, dans la région de Lyon, le Genevois, le Dauphiné, les Baronnies et jusqu'à Pierrelatte.

Dés le règne de Humbert III, sa femme Clémence de Zähringen étant morte prématurément, il en conçoit un grand chagrin et souhaite fréquemment se recueillir sur sa tombe, aussi il demande, et obtient, que se femme soit enterrée dans le Cloître de Hautecombe. Puis, logiquement, à sa mort, il veut être enterré à ses côtés, et la tradition se perpétue. Ainsi l'Abbaye devient elle la Nécropole de la Maison de Savoie. Le Monastère reçoit en conséquence une Rente annuelle pour prier pour l'âme des défunts.

Au début du (XIIIème siècle), l'Abbaye reçoit de nombreuses donations, surtout dans le pays de l'Albanais et le haut pays d'Aix. Le fils d'Humbert III, Thomas Ier, lui accorde de nombreux privilèges concernant le commerce, la possession foncière, la chasse, et lui fait de multiples donations directes, notamment le 11 Novembre (1203), où il octroie à l'Abbé une Charte et, en (1209), où, toujours dans une Charte, le Comte accorde à l'Abbaye des Privilèges. Sous Robert, Abbé de Hautecombe au début du (XIIIème siècle), l'abbaye reçoit de nombreux dons, surtout en terrains de la région. L'évêque Anselme de Patras en Grèce donne de l'argent qui sert à l'aménagement intérieur de l'Eglise, et 2 Reliques : la Tête de Ste Irène de Thessalonique, qui devient la Patronne de l'Abbaye et des Bateliers du lac, ainsi qu'un Doigt de St André.

A la fin du règne d'Amédée V, l'Abbaye de Hautecombe est une véritable puissance Féodale, détentrice de nombreux droits Suzerains, sauf ceux spécifiquement Comtaux, notamment en matière d'Urbanisme et de Justice. Ses possessions s'agrandissent fortement, notamment dans les Bauges sur les pentes du mont Margériaz, à Jarsy, Arith, Bellecombe en Bauges. Les archives de Turin gardent la trace de nombreux litiges territoriaux entre l'Abbaye et les juges des Châtellenies et Bailliages de Lavours et Lignin.

Au début du (XIVème siècle), c'est Conrad qui est Abbé du monastère, avant de prendre en charge l'hôtel Dieu de Lyon puis de devenir, en (1313), abbé de Clairvaux. Outre l'hôtel Dieu, l'abbaye reçoit la charge de l'Aumône Générale de Lyon, établissement destiné aux Pèlerins, et celle de l'entretien du pont voisin jeté sur le Rhône, devenu aujourd'hui le pont de la Guillotière. Cet établissement Hospitalier avait été fondé par Jean de Faverges qui le confie aux Cisterciens de Hautecombe, sous la juridiction desquels il reste environ 3 siècles. A l'apogée de sa prospérité, les dons et legs faits à l'Abbaye lui permettent d'étendre les terres qu'elles contrôle du Genevois à Pierrelatte2

Les Abbés sont parfois choisis par les Souverains de Savoie comme exécuteurs testamentaires. L'Abbé Robert reçoit une mission spéciale du Pape Grégoire IX concernant les indulgences relatives aux aumônes destinées à la construction de la grande Eglise de Genève, les travaux de construction de celle ci étaient interrompus du fait de la révocation des indulgences initialement promises. Par la suite, l'Abbé Robert se voit confier par le Pape d'autres missions diplomatiques, au 1er rang desquelles son action de (1233) conjointe avec celle de l'Archevêque de Sens Gaultier le Cornu auprès du Roi Louis IX pour lui conseiller de ne pas entrer en guerre contre l'Angleterre d'Henri III, mission couronnée de succès.