Glossaire -
Biographies
Chronologie -
Evêques
Photos
- le Labyrinthe et l’Evêque
Villard de Honnecourt, Maître d’oeuvre qui a vécu et travaillé au (XIIIème siècle), consigne dans son carnet de dessins, le tracé d’un Labyrinthe Circulaire, semblable à celui de la Cathédrale de Chartres, de la chapelle de la Prévôté de Toulouse, et de la Cathédrale de Mirepoix. Il s’agit d’une chose vue, relevée par Villard de Honnecourt lors de ses pérégrinations à travers la France. Le Labyrinthe se trouve associé ici à diverses représentations Animales. Telle association, de prime abord, surprend. Elle s’éclaire au regard des analogies que l’on repère peu à peu dans la composition de l’ensemble. Il s’agit d’analogies de type plastique, liées au jeu des formes circulaires, que Villard de Honneourt décline en variations annelées, ainsi qu’à la répétition des lignes segmentées ou brisées qui arment la géométrie des figures. D’où vient que la géométrie semble travaillée ici par quelque arrière pensée, quelque préoccupation fantastique. D’où vient le sentiment d’inquiétante étrangeté que suscite la vue de tels dessins. Il vient, selon moi, d’un excès de sens. Villard de Honnecourt, en effet, figure là "more geometrico" autre chose qu’un superbe jeu de formes. Il délègue à la géométrie le soin de signifier ce qu’il ne montre pas. Villard de Honnecourt reproduit ici le tracé du Labyrinthe de Chartres, lequel tracé est aussi celui du Labyrinthe de la Prévôté de Toulouse, et, dernier de la série, celui du Labyrinthe de Mirepoix.
Le tracé ménage un centre vide. L’ensemble des figures dessinées par Villard de Honnecourt semble s’organiser en forme de réponse à la question qui n’est pas posée, mais plastiquement signifiée, relativement au vide qui demeure béant au Coeur du Labyrinthe. L’exploration des formes animales précipite la manifestation d’un effet de sens qui culmine avec la forme du Chat représenté, à Gauche du Labyrinthe, dans une pose Circulaire, laquelle se laisse mentalement superposer au centre laissé vide au Coeur de ce dernier. Le Chat, au Moyen Age, passait pour un animal Malin. Une Bulle de Grégoire IX, en (1233), stipulait que les Chats Noirs étaient les Serviteurs du Diable. Au centre du Labyrinthe, ce qui, symbolisé par le Chat, menace de s’ouvrir, c’est l’Enfer. Les formes d’insectes ou d’Arthropodes semblent figurer l’angoisse des tourments infernaux. De façon paradoxale, la géométrie, ici, ne conjure pas l’angoisse, elle l’accuse. Barres et cercles, annelés ou concentriques, signifient, dans la perspective des fins dernières, l’angoisse de l’inexorable. L’ensemble de figures reproduit ci dessus montre que l’inquiétude Métaphysique constitue la source et l’horizon sous le rapport desquels Villard de Honnecourt déploie "more geometrico" son art du dessin. Il montre aussi que la figure du Labyrinthe se trouve associée, dans l’imaginaire collectif, à des représentations possiblement autres que celles de la Résurrection, par là pré modernes, dans la mesure où elles témoignent de l’incertitude du Salut ou des Mouches.
Philippe de Lévis, commanditaire d’un Labyrinthe dont le tracé est identique à celui du Labyrinthe de Villard de Honnecourt, choisit, quant à lui, d’installer au centre du tracé la figure de l’antique Minotaure. On ne connaît pas les raisons d’un tel choix. Il s’agit, en toute hypothèse, d’un choix éclairé, certes possiblement assorti de considérations qui relèvent du secret de l’intime, mais nécessairement déterminé par le Dogme, dans le cadre duquel l’évêque a vocation d’agir et de penser en témoin de la :
"divine Espérance". Né de la pente du dessin, et, plus originairement, du Démon de l’analogie, le Chat qui, chez Villard de Honnecourt, vient habiter, comme en rêve, le centre laissé vide au Coeur du Labyrinthe, témoigne, quant à lui, d’un tour obsessionnel de la pensée imageante, et, via la géométrie conçue comme forme Causative, d’un songe de la raison qui enfanterait des Monstres. Il y a loin, de la folle pensée du dessinateur à la noble Méditation de Monseigneur de Lévis. Villard de Honnecourt portait, un regard tout particulier sur les personnages d’Evêques.
La redécouverte du Labyrinthe date des années (60). Gratien Leblanc, membre de la "Société Archéologique du Midi de la France", a pu examiner le Labyrinthe peu de temps après la mise à jour de ce dernier. L'état de détérioration du carreau central était sans doute, à l'époque, un peu moins avancé qu'aujourd'hui. Le témoignage de Gratien Leblanc est précieux, car il s'accompagne d'un croquis de la chose vue, croquis grâce auquel on distingue mieux ce qui demeure lisible dans l'état actuel du carreau. Concernant les carreaux dans leur ensemble, Gratien Leblanc formule d'abord l'observation suivante. Le carrelage est entièrement constitué de de faïence Peinte, les plus usés d'entre eux laissent apparaître par place le Rouge de leur argile cuite, sur laquelle est plaquée une couverture non transparente, de couleur Blanchâtre, elle est constituée par un émail Stannifère utilisé comme support du décor et comme Fondant, la fusion de la matière colorée dans l'émail a entraîné, comme il arrive souvent, quelque indécision dans les contours. Voici maintenant la description du carreau central, tel qu'a pu le voir Gratien Leblanc, au décours des années (60).
Une composition malheureusement bien effacée par les pas des Dignitaires qui se sont succédé dans cette Chapelle pendant plus de (II siècles). La où on s'attendrait, sur une Croix, à voir la tête du Christ, se dresse un monstre dont on voit bien que le haut du corps, c'est un homme dessiné de 3¼ qui se tourne vers la Gauche, ses Pectoraux puissants s'affirment au dessus des Intercostaux bien mis en valeur. La tête, au cou de Taureau et au front bombé, est tournée vers l'Adversaire éventuel que fixe un morne regard mais que menacent 2 petites cornes sombres nettement pointées vers lui. De ses bras robustes cet Athlète vigoureux semble tenir fermement une lance qui porte bannière, celle ci épouse le contour du dernier cercle du Labyrinthe et se déploie largement derrière sa tête, et on y lit en lettres capitales : "INOTAVR…" Nul doute sur l'identité du personnage, il s'agit bien du monstre né des amours contre nature de Pasiphaé, la femme de Minos, et du taureau envoyé par Poséidon, ce Minotaure que le Roi de Crète fit enfermer dans le Labyrinthe, construit à cet effet par le fameux architecte Dédale. La partie inférieure, bien abîmée, est plus énigmatique, est ce l'amorce d'un corps de Taureau à la robe brune, planté au milieu d'une verte prairie et dont nous ne voyons plus que le bas du poitrail ? Dans ce cas, l'artiste aurait dessiné plutôt un Centaure que le Minotaure qui avait le corps d'un Homme et la tête d'un Taureau.
Gratien Leblanc considère que le Labyrinthe de Mirepoix a été posé ultérieurement à l'édification de la Chapelle Ste Agathe, soit entre (1520)-(1525) "terminus a quo - premier Jour" et (1537) "terminus ad quem - dernier Jour". Il s'agit du dernier Labyrinthe d'église conçu en Occident. Philippe de Lévis témoigne là d'une sorte de fidélité au temps de sa jeunesse, partant, au chemin de toute une vie, puisque, dès l'âge de 13 ans, il avait pu admirer le Labyrinthe installé à Toulouse dans la Chapelle de la Prévôté.
Haut de page
|