Fouquier Tinville

- Fouquier Tinville

Antoine Quentin Fouquier de Tinville, dit Antoine Fouquier Tinville, né à Herouël Aisne, le 10 Juin (1746), mort guillotiné à Paris le 7 Mai (†1795)<, est un homme de loi et Révolutionnaire Français, Accusateur Public du Tribunal Révolutionnaire, il est responsable d'environ 2.600 morts à la Guillotine. C'est Fouquier Tinville qui eut l'idée de propager des rumeurs pour juger la Reine Marie Antoinette. Il naît à Hérouel le 10 Juin (1746) et est baptisé 2 jours plus tard, d'où l'erreur fréquente de sa date de naissance. Il est le 2ème d'une fratrie de 5 enfants. Son père, Elie Fouquier de Tinville, cultivateur et Seigneur d'Hérouël lui attribue le nom de la terre de Tinville, tandis que celui d'Hérouël échoit à son frère ainé, Pierre Eloy. Les 2 frères cadets auront ceux de Foreste et de Vauvillé. Sa mère, Marie Louise Martine, vient d'une famille aisée.

Grâce à l'intervention de son oncle maternel, l'abbé Martine de la Motte, il entre au collège de Noyon où il étudie durant 6 ans. Puis, sous la pression paternelle qui voit d'un meilleur œil une carrière dans la magistrature que dans les ordres, il entre comme clerc apprenti chez Maître Cornillier, Procureur du Roi au Châtelet, à Paris, puis en (1769) chez Maître Berthereau, aussi Procureur. Besogneux, acharné au travail et très consciencieux, il se fait si bien remarquer de son patron qu'il devient premier clerc, puis grâce à l'aide de sa famille et d'un emprunt, il peut racheter à Maître Cornillier sa charge lorsque ce dernier se retire, en (1774). Le 21 Janvier (1774), la Chambre des Procureurs au Châtelet lui délivre son "admittatur". Il épouse, le 19 Octobre (1775), sa cousine Germaine, Dorothée Saugnier, dont il aura 5 enfants. Commence une période de bonheur pour le procureur Fouquier de Tinville. Hélas, sa femme meurt des suites de l'accouchement de sa dernière fille, en (1782), et avec ce décès, son monde se délite peu à peu. Il se remarie toutefois quelques mois plus tard avec une jeune fille de la petite noblesse, Henriette Gérard d'Aucourt, dont il aura 2 enfants. Cependant, dans l'atmosphère affairiste de l'époque, le magistrat semble ne pas avoir pu s'empêcher de se mêler d'entreprises hasardeuses, et il doit vendre sa charge, en (1783), pour rembourser ses dettes. Suit une période où l'on ne trouve plus trace de lui, sinon plus tard dans les lettres de ses amis. Il obtint un emploi dans les bureaux de la police du Roi et, en (1789), devint commissaire de son quartier.

- Fouquier et la Révolution

La Révolution Française allait permettre à Fouquier Tinville de donner toute sa mesure. Il émerge de l'anonymat lorsqu'il obtient un poste de Commissaire à la section dite de "Saint Merry", dans le quartier où il réside avec sa famille. C'est de là qu'il reprendra pied dans la carrière de la Magistrature, peu à peu. Avec l'appui de son cousin, Camille Desmoulins, il obtint d'être désigné Directeur d'un des jurys d'accusation du Tribunal Extraordinaire du 17 Août (1792), créé pour juger les Royalistes arrêtés lors de la journée du 10 Août (1792). Après la suppression de ce tribunal, le 29 Novembre (1792), il devint Substitut de l'Accusateur Public du Tribunal Criminel de la Seine. Le 12 Mars (1793), il fut nommé Juge au Tribunal de Saint Quentin mais il s'abstient de prendre son poste immédiatement. Il est finalement élu par la Convention Accusateur Public du nouveau Tribunal Criminel Extraordinaire, futur Tribunal Révolutionnaire. Il donne alors sa démission du poste au tribunal de Saint Quentin.

- Fouquier Accusateur Public

Le 10 Mars (1793), la Convention Nationale avait créé le Tribunal Criminel Extraordinaire, qui porta le nom de Tribunal Révolutionnaire à partir du 8 Brumaire an (II) 29 Octobre (1793). En sa séance du 13 Mars, la Convention procéda à l'élection des membres de ce tribunal. Louis Joseph Faure fut élu Accusateur Public, par 180 voix sur 377 votants. Furent élus substituts : Fouquier Tinvillle, 163 voix, Fleuriot Lescot, 162 voix et Donzé Verteuil, 162 voix. Faure déclina la proposition et Fouquier Tinville accepta la fonction. C'est lui qui fut le moteur du tribunal, qui accueillit les juges et les jurés, qui choisit la salle, qui rédigea les actes d'accusation, qui fit appliquer la loi, qui reçut le bourreau, qui fixa le nombre de charrettes de condamnés, qui rendit compte au Comité de Salut Public. Initialement surveillé par la Commission des 6, le tribunal est, dès le début de son activité, débarrassé de cette tutelle, et c'est à l'Accusateur Public qu'échoit l'ensemble des prérogatives de faire arrêter, poursuivre et faire juger, sur dénonciation des autorités ou des citoyens.

- Les Grands Procès de la Terreur

C'est Fouquier Tinville l'Accusateur Public aux procès de Charlotte Corday, 17 Juillet (1793), de la Reine Marie Antoinette, 23-25 Vendémiaire an (II), 14-16 Octobre (1793), des Girondins, 3-9 Brumaire an (II), 24-30 Octobre (1793), de Barnave 7-8 Frimaire an (II, 27-28 Novembre (1793), de Madame du Barry 16-17 Frimaire an (II), 6-7 Décembre (1793), des Hébertistes, 1er-4 Germinal an (II), 21-24 Mars (1794), des Dantonistes 13-16 Germinal an (II), 2-5 Avril (1794), d'Elisabeth, Sœur de Louis XVI, du Comte et de la Comtesse de Sérilly et de leur famille 21 Floréal An (II), 10 Mai (1794), des Carmélites de Compiègne 29 Messidor an (II), 17 Juillet (1794). C'est encore lui, qui après le 9 Thermidor, procéda à la reconnaissance d'identité des rebelles mis hors la loi Robespierre, Saint Just, Couthon etc., avant leur envoi à la guillotine.

- Le procès de Fouquier'

Dès le 10 Thermidor 28 Juillet (1794), le Comité de Salut Public s'occupa du renouvellement complet du tribunal et Barère présenta à la Convention une liste de juges et de jurés. En tête de la liste figurait le nom de Fouquier Tinville, avec la mention Accusateur Public. Ce n'est que 3 jours plus tard que Fréron s'étonna de voir le nom de Fouquier Tinville sur la liste et demanda un décret d'arrestation contre lui. Prévenu de sa prochaine arrestation, Fouquier Tinville, sûr de son bon droit et de la reconnaissance de son innocence, va se rendre de lui-même. Son procès fut celui du Tribunal Révolutionnaire. Le 8 Germinal an (III) 28 Mars (1795), Fouquier Tinville et ses 23 Coaccusés, dont Marie Joseph Emmanuel Lanne, comparurent devant le Tribunal Révolutionnaire réorganisé par la loi du 8 Nivôse an (III) 28 Décembre (1794). 6 autres étaient en fuite. Judicis était le nouvel Accusateur Public. Il l'accusait notamment, surtout depuis la loi du 22 Prairial an (II) 10 Juin (1794), d'avoir mis en Jugement un nombre considérable de Personnes qui ne s'étaient jamais connues, de les comprendre dans le même Acte d'Accusation, et de leur approprier le même Délit ; d'avoir mis en Jugement et fait Exécuter certaines personnes, sans qu'il y eût contre elles aucun Acte d'Accusation, d'avoir fait Exécuter certaines Personnes sans qu'il y eût contre elles ni Jugement ni Condamnation ; que par suite de Précipitation, il y eut Substitution d'une Personne à une Autre, que des Personnes non Condamnées furent Exécutées à la place de Personnes Condamnées ; que des Jugements d'un grand nombre de Personnes sont toujours en Blanc et ne comportent aucun Dispositif alors que ces Personnes sont toutes Exécutées, etc.

- les Témoins

Du 9 Germinal an (III) 29 Mars (1795) au 12 Floréal 1er Mai, 419 témoins, dont 223 à décharge et 196 à charge, telle la ci-devant Comtesse de Sérilly, rescapée in extremis de la Guillotine et qui se présenta son acte de Décès à la main, furent entendus.

- la Défense

Le 12 Floréal, le substitut Cambon prononça son réquisitoire et pendant un jour et demi, Fouquier Tinville présenta sa défense. Il termina le 14 Floréal en ces termes :
    "Ce n'est pas moi qui devrais être traduit ici, mais les chefs dont j'ai exécuté les ordres. Je n'ai agi qu'en vertu des lois portées par une Convention investie de tous les pouvoirs. Par l'absence de ses membres, je me trouve le Chef d'une Conspiration que je n'ai jamais connue. Me voilà en butte à la Calomnie, à un peuple toujours avide de trouver des coupables."
     Les 15 et 16 Floréal, les Défenseurs de ses coaccusés s’exprimèrent.

- le Verdict

Le 17 Floréal 6 Mai, la délibération dura 2 heures, et à 5 heures il fut donné lecture du Jugement. Fouquier Tinville et 15 de ses coaccusés, Foucault, Scellier, François Garnier-Launay6, Leroy, Renaudin, Vilate, Prieur, Châtelet, Girard, Lanne, Herman, Boyaval, Benoît, Verney et François Dupaumier, furent condamnés à Mort :
     "Convaincus de Manœuvres et Complots tendant à Favoriser les projets liberticides des ennemis du Peuple et de la République, à provoquer la dissolution de la Représentation Nationale, et le renversement du Régime Républicain, et à exciter l'armement des citoyens les uns contre les autres, notamment en faisant périr sous la forme Déguisée d'un Jugement une foule innombrable de Français, de tout âge et de tout sexe ; en imaginant, à cet effet, des projets de Conspiration dans les diverses maisons d'arrêt de Paris ; en dressant, dans ces différentes maisons des listes de Proscriptions, etc., et d'avoir agi avec de Mauvaises Intentions".
     Maire, Harny, Deliège, Naulin, Lohier11, Delaporte, Trinchard, Duplay, Brochet, Chrétien, Ganney, Tray, Guyard, Beausire et Valagnose, Acquittés, furent mis en liberté le même jour.

l'Exécution

Ramené à la Conciergerie, Fouquier Tinville écrivit ces dernières lignes :
     "Je n'ai rien à me reprocher : je me suis toujours conformé aux lois, je n'ai jamais été la créature de Robespierre ni de Saint-Just ; au contraire, j'ai été sur le point d'être arrêté 4 fois. Je meurs pour ma Patrie et sans reproche. Je suis satisfait : plus tard, on reconnaîtra mon innocence".
     Son exécution eut lieu le lendemain matin, place de Grève. Il fut le dernier Guillotiné des 16 Condamnés à Mort. Le nom de Fouquier Tinville est resté à la Postérité comme le type même de l'Accusateur ou de l'Intellectuel Violemment Inquisitoire, Arbitraire, sans Nuances et sans Respect pour les Droits de l'Accusé.

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