- Melgueil l'Excommunier
"Cluny 1109-1126"

(Né vers (1075), mort en (†1126) à Rome).

Officiellement, ce n'est pas Pons de Melgueil "Pontius, Pons, Ponzio" qui succède à Hugues de Semur, mais un moine qui ne lui survit que quelques semaines, et dont le catalogue officiel des Abbés de Cluny ne fait même pas mention. Pons est né dans une importante famille de seigneurs Languedociens et un de ses oncles, Rainier, sera Cardinal avant d'être élu Pape sous le nom de Pascal II. Le Comté de Melgueil, aujourd'hui Mauguio, abritait la grande cathédrale de Maguelonne et accueillit de (1096)(1165) les Papes en mal de paix ou de protection. C'est ainsi qu'Urbain II, Gélase II, Calixte II et Alexandre III, furent les hôtes des seigneurs de ces lieux. Urbain II y prêche la 1ère croisade en (1096) et en profite pour remercier la Comtesse Almodis, veuve de Pierre de Melgueil qui, depuis (1085), avait fait don de son Comté au pontife. Gélase II, en conflit avec l'Empereur Germanique, est reçu au château Comtal par Pons, en (1119). Calixte II vient y chercher courage avant d'affronter le souverain Germanique et Alexandre III s'y réfugiera au cours d'une bataille navale, en (1162). Il y demeurera 3 mois.

Pascal II renouvela plusieurs fois l'exemption dont bénéficiait le monastère dirigé par son filleul. Ce dernier a d'abord été Oblat à l'abbaye de Saint Pons de Thomières, avant de prononcer ses voeux à Cluny. Pons fut élu abbé de Cluny en (1109), dans un contexte économique, historique et religieux très chahuté, surtout à compter de (1119). Plusieurs facteurs sont à signaler.

Les problèmes financiers dû aux dépenses somptuaires que son prédécesseur engagea pour la construction de la 3ème abbatiale de Cluny, oeuvre que Pons poursuivit. D'autre part, Cluny entre à cette période dans une nouvelle économie, celle de l'échange monétaire, alors que, jusque là, son économie domaniale était plutôt de type autarcique, fondée sur l'exploitation en faire valoir direct.

- l'Intransigeance de Pons

Abbé Schismatique, après 13 années d'un Abbatiat qui, s'il avait bien commencé, dégénéra dans le tumulte, le faste, et l'intransigeance de Pons de Melgueil à défendre sans concessions l'exemption totale de son abbaye. Les moines de Cluny se plaignent du comportement de leur Abbé, en (1119), directement auprès du Pape, Calixte II, qui fut lui même moine de Cluny convoque l'Abbé en (1122) et, si rien n'a transpiré de leur entrevue, on peut sans trop se tromper affirmer que l'abdication qui suivit de Pons, et son exil, en forme de pèlerinage à Jérusalem, en sont la conclusion. Tous ces déboires n'ont cependant pas empêché Pons de Melgueil de continuer l'oeuvre de ses prédécesseurs, l'expansion de "l'Ecclésia Cluniacensis" se poursuivit avec la même intensité qu'au temps d'Hugues de Semur? particulièrement en Espagne, en Italie et, surtout, en Angleterre, fondation de 5 couvents. Il travailla à l'embellissement de l'abbaye même, continuant les travaux à l'Abbatiale de Cluny III vers (1157), mais aussi en élevant un nouveau cloître (1120)-(1122), dont il nous reste quelques chapiteaux.

- l'Excommunication de Pons

Exilé à Jérusalem pour y faire pénitence, il en reviendra pour tenter de reprendre par la force son siège Abbatial en (1125). Profitant d'une absence de son successeur, parti visiter des dépendances d'Aquitaine, il réunit une bande de brigands et des moines de tout poil et investit Cluny, défendue par le grand Prieur Bernard d'Uxelles, ancien homme d'armes. Grâce un certain nombre de moines acquis à sa cause, ainsi que divers Seigneurs des environs, Pons réussit à prendre possession de Cluny. Cela ne se fit pas sans beaucoup de violences, des moines furent torturés jusqu'à ce qu'ils fissent allégeance, d'autres furent jetés hors de l'abbaye ou mis au cachot. L'abbaye fut mise à sac, les objets de valeurs, fondus, ayant permis à Pons de payer tous ceux qui l'avaient aidé à perpétrer ses forfaits. Usurpant les droits des seigneurs de Cluny, il les exerça de manière criminelle sur les villages alentours, qui furent pillés, brûlés, et dont plus d'un habitant furent massacrés. Tout ceci n'empêcha pas certains prieurés environnants de prendre le parti de l'indigne Abbé, comme le prieuré de Souvigny, par exemple. L'Archevêque de Lyon en vint à excommunier Pons et 8 mois après son usurpation, il fut appelé en (1126) par le pape Honorius II, successeur de Calixte II, à comparaître au concile de Lyon . Il ne répondra pas à l'appel et le pontife confirma l'excommunication, le fit arrêter et emprisonner à Rome, où il mourut de fièvre quelques mois plus tard en (†1126) dans sa prison romaine. Le Pape permit d'abord que le corps de Pons reposât à l'église St André. Beaucoup plus tard à la demande de Pierre le Vénérable, sa dépouille sera ramenée à Cluny où son tombeau le représentera les pieds liés, une main coupée et sa crosse brisée.

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