Thérésa Tallien

- Thérésia Cabarrus

Thérésa Cabarrus, ou Thérésia Cabarrus, également connue sous le nom de son second époux Madame Tallien, née le 31 Juillet (1773), au palais de San Pedro à Carabanchel Alto, près de Madrid, et morte le 15 Janvier (†1835), au château de Chimay, à 61 ans, dans la province de Hainaut, est une Salonnière et personnalité de la Révolution Française, ses surnoms "Notre Dame de Bon Secours, puis Notre Dame de Thermidor, mais aussi Notre Dame de septembre." Partisan active des idées nouvelles, elle doit néanmoins se réfugier à Bordeaux dans la famille de son père et parmi ses amis Girondins. Comme eux, elle est arrêtée, mais est libérée par Tallien. Elle aide des centaines de prisonniers à échapper à la guillotine, d’où son surnom de "Notre Dame de Bon Secours". A nouveau emprisonnée, Thérésa est en partie à l’origine du 9 Thermidor an II, son amant, Jean Lambert Tallien, parce qu'elle lui écrit qu'elle est condamnée, se décide à participer au coup d'État qui mettra fin à la Terreur en provoquant la chute de Robespierre. D’où son surnom de "Notre Dame de Thermidor". Elle se marie avec Tallien en (1794). Femme d'esprit, amie de nombres artistes elle tient un salon et devient une des reines des Merveilleuses et du Directoire, avec Joséphine de Beauharnais, Fortunée Hamelin, Mademoiselle Lange et Juliette Récamier. Après avoir vécu et eu des enfants avec Barras et Ouvrard, elle se remarie avec le prince François Joseph de Riquet de Caraman.

La famille Cabarrus est originaire de la Navarre Espagnole et vient au début du (XVIIème siècle) se fixer à Capbreton. Par son dynamisme dans le commerce elle acquiert une grande fortune. Née Juana Maria Ignazia Thérésa Cabarrus, elle est la fille du financier François Cabarrus, né à Bayonne le 15 Octobre (1752), mort à Séville le 17 Août (†1810), fondateur de la Banque San Carlos, ancêtre de la Banque centrale espagnole, en (1782), anobli en (1789) par Charles IV d'Espagne avec le titre de Comte, puis Ministre des Finances de Joseph Bonaparte. Sa mère, Maria Antonia Galabert est la fille d'un industriel français établi en Espagne.

Elevée en Espagne par une nourrice jusqu’à l’âge de 3 ans, Thérésa Cabarrus est ramenée par son grand père à Carabanchel. Elle ne reste que 2 ans au milieu de sa famille. Elle est élevée par des religieuses en France de (1778) à (1783). En (1785), elle peut regagner provisoirement le château familial. Elle est déjà très belle et un jeune frère de sa mère demande sa main à François Cabarrus. Son père, scandalisé, chasse son beau frère de chez lui et envoie Thérésa à Paris pour y parfaire son éducation et se marier. Elle n’a que 12 ans, mais cette fois ci sa mère l’accompagne.

- Mariage avec Devin de Fontenay

François Cabarrus veut renforcer ses positions en France et le mariage de sa fille le 21 Février (1788), avec Jean Jacques Devin de Fontenay (1762)-(1817), conseiller à la 3ème chambre des enquêtes du Parlement de Paris, fils d’un Président de la Chambre des Comptes et petit fils d’une Lecoulteux, de la très riche et puissante famille de ce nom, fait partie de son plan. Et Lecoulteux et Cie compte sur ce mariage pour retrouver en Espagne son influence qui s’était dégradée. Les biens de l'époux sont estimés à 800.000 livres et sa charge lui en rapporte 60.000. La dot de la mariée qui n’a que 15 ans est de 500.000 livres. Thérésa Cabarrus est présentée à la cour de Louis XVI. Ils vont aussi à la cour d’Espagne, où l’accueil chaleureux que fait la famille Royale à Thérésa pousse le marquis de Fontenay, qui est dans le même temps méprisé, à écourter leur voyage.

Devin de Fontenay est un débauché et Thérésa Cabarrus décide que leur union ne serait plus que de façade. Thérésa Cabarrus est l'ornement de la bonne société du Marais. Elle reçoit dans ses salons le Général La Fayette, les 3 frères Lameth, Félix Lepeletier de Saint Fargeau, Antoine de Rivarol, Dominique de La Rochefoucauld, et Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau. Elle s'est affiliée, en (1789), à la loge maçonnique, la loge Olympique ?. Elle s'enthousiasme pour les idées à la mode et participe à la fête de la Fédération ?. Elle est membre du club de (1789) ?. Elle a un fils, le 2 Mai (1789), Théodore Devin de Fontenay (1789)-(1815), dont le père est peut être Félix Lepeletier de Saint Fargeau ?, le frère de Louis Michel Lepeletier de Saint Fargeau. Un premier malheur la frappe. Son père subit à ce moment les inconstances de la haute fortune, il retrouve, à la mort du Roi Charles III d'Espagne, un implacable ennemi, le nouveau Ministre Lerena. Il est arrêté le 21 Juin (1790), et détenu avec une extrême rigueur.

En Novembre (1792), son mari a dépensé toute sa dot et doit émigrer. En (1793), ils se rendent avec leurs fils à Bordeaux. Elle lui fait cadeau de ses bijoux et il les abandonne, après avoir divorcé d’elle le 5 Avril (1793). La femme de plaisirs, de modes et de fêtes devient une bienfaitrice des pauvres, le tout au service de la Convention. Lors de la persécusion des Girondins elle refuse de rejoindre l’Espagne. Thérésa est emprisonnée au château du Hâ, à Bordeaux. Bordeaux est alors le théâtre des rigueurs de la Montagne, qui poursuit avec acharnement les derniers Girondins. Elle intervient auprès des révolutionnaires pour faire libérer sa famille ou d’autres premières victimes de la Terreur, comme les Boyer Fonfrède. Début Décembre (1793), elle est arrêtée à son tour et détenue dans des conditions difficiles au château du Hâ, la prison de Bordeaux pour avoir fait libérer des suspects. Elle écrit à Jean Lambert Tallien, représentant en mission qui l’a déjà aidé, pour réclamer sa liberté ou l'intéresser à son sort.

- Tallien fin 1793

Tallien, séduit par sa beauté, la fait libérer et s'installe avec elle. Elle use de son influence pour protéger tous ceux qu'elle peut. Sous l'influence de sa passion amoureuse, le proconsul apporte moins de sévérité dans l'exécution des décrets du comité de salut public. Son dévouement va lui valoir le surnom de "Notre Dame de Bon Secours" ?. En Décembre (1793) le Discours sur l'éducation, par la citoyenne Thérésa Cabarrus, est lu dans la séance tenue au temple de la Raison de Bordeaux, le 1er décadi du mois de nivôse, jour de la fête Nationale, célébrée à l'occasion de la reprise de Toulon, par les armes de la République. Mais, en sauvant des vies, elle risque à nouveau la sienne. Cette liaison d'un conventionnel avec une riche aristocrate fait scandale. Tallien doit revenir à Paris pour se justifier. Thérésa Cabarrus l'y rejoint. Elle est devenue suspecte à Bordeaux après le décret du 16 Avril interdisant aux ci devant nobles de séjourner à Paris et dans les ports. Mais à la suite d’un ordre du Comité de Salut Public signé Robespierre, Collot d’Herbois et Prieur de la Côte d’Or elle est à nouveau arrêtée et enfermée à la prison de la Force, puis à la prison des Carmes. Elle y aurait rencontré Joséphine de Beauharnais, qui aurait écrit de sa main un message contresigné par Thérésa sur un mur : "Liberté, quand cesseras-tu d’être un vain mot ? Voilà 17 jours que nous sommes enfermées. On nous dit que nous sortirons demain, mais n’est-ce pas là un vain espoir ?"

Sur le point de passer en jugement, pour la guillotine, elle envoie à Tallien ce mot : "Je meurs d'appartenir à un lâche." Cette missive le détermine à entrer dans la conjuration contre Robespierre et à s'illustrer le 9 Thermidor ? à la Convention, où il empêche Saint Just de prendre la parole. Libérée, Thérésa est surnommée "Notre Dame de Thermidor", car la Révolution Thermidorienne sauve de nombreuses vies. William Pitt le Jeune en apprenant l’attitude de la jeune femme qui a poussé Tallien à agir s’écrie : "Cette femme serait capable de fermer les portes de l’enfer". Thérésa lance la mode néo grecque ?. Son salon, dans sa maison des Champs Elysées, devient célèbre. Elle apprend le dessin auprès de Jean Baptiste Isabey. Elle épouse Tallien le 26 Décembre (1794) et l'influence grandement dans son parcours politique pendant la Convention Thermidorienne, mais l'abandonne bientôt, quand il est rejeté à la fois par les montagnards et par les modérés, le jugeant dépassé. Tallien et Thérésa ont une fille, Rose Thermidor Tallien (1795)-(1862) filleule de Rose de Beauharnais, future impératrice Joséphine de Beauharnais. Rose Termidor changera son nom en Joséphine en même temps que sa prestigieuse marraine, et épousera le comte Michel Claude Gaspard Félix Jean Raymond de Narbonne Pelet en (1815). Son mariage avec Tallien lui vaut le surnom de "Notre Dame de Septembre". Si Tallien est en partie responsable des massacres de Septembre, Thérésa les a condamnés. Elle ne lui pardonne pas son attitude envers des prisonniers, qui ont été fusillés. "Trop de sang dans les mains de cet homme, confie t'elle à une amie, je fus à jamais dégoûtée de lui ". Elle se sépare de lui en (1795). Elle a d’autres enfants, mais avec différents amants et son 3ème époux. Ils ne divorcent que le 8 Avril (1802 après la naissance de 3 d’entre eux.

- Paul Barras

En (1796), les biens des époux Devin de Fontenay sont vendus. L'année suivante, Thérésa Tallien est l'amie très inséparable de Lazare Hoche et de Juliette Récamier. C'est cette même année (1797) que Paul Barras, homme fort du nouveau régime, devient son amant. Dans son château de Grosbois, où Thérésa fait office de maîtresse de maison, il accueille Joséphine de Beauharnais, Madame de Mailly, Madame de Chateaurenaud, Cambacérès, Charles Maurice de Talleyrand Périgord, Joseph Fouché, Anne Jean Marie René Savary, le financier Gabriel Julien Ouvrard, Choderlos de Laclos, Benjamin Constant, Madame Récamier. Le père de Thérésa, François Cabarrus, étant sorti de prison, est chargé par Godoy, alors chef du Gouvernement Espagnol et qui sait que l'ex Madame Tallien est devenue la maîtresse de Barras, d'entamer des négociations avec la France. La signature du traité de Bâle 22 Juillet (1795) entraîne la réhabilitation de Cabarrus et son indemnisation pour ses trois années passées dans les geôles espagnoles. Thérésa a un enfant de Barras né le 20 Décembre (1797) au château de Grosbois, mais mort à la naissance.

- Ouvrard

A l'Automne (1798), Thérésa et le richissime financier Gabriel Julien Ouvrard se rencontrent au cours d'une chasse donnée au château de Grosbois. Le Directeur Louis Marie de La Révellière Lépeaux prétend qu'elle aurait fait l'objet d'un marché honteux entre Paul Barras, qui n'est son amant que pendant un temps relativement court, et Gabriel Julien Ouvrard. A partir de cette date, Thérésa est fréquemment vue au côté du fournisseur des armées. A peine 6 mois après leur rencontre, celui ci offre à sa maîtresse un hôtel particulier près de la rue de Babylone et l'installe au château du Raincy, qu’il loue en (1799). De cette union naissent 4 enfants entre (1800) et (1804). Ouvrard est nommé en (1798) fournisseur des vivres de la Marine et fournisseur de d’escadre Espagnole, du fait des liens unissant Thérésa au ministre et Amiral Etienne Eustache Bruix. C'est chez Madame Tallien que Bonaparte et Ouvrard se rencontrent. Ouvrard écrit plus tard dans ses Mémoires : "J'étais loin de prévoir qu'il tiendrait dans ses mains les destinées du monde et que son inimitié aurait une si funeste influence sur ma vie."

- Napoléon Bonaparte

Notre Dame de Thermidor, est la reine du Directoire et Bonaparte n’est encore qu’un jeune Général qu’elle prend quelque peu sous sa protection.Elle va même jusqu’à lui faire fournir du drap par l’intendance car son uniforme est en très mauvais état et quand elle le voit dans son uniforme neuf, elle lui lance : "Eh bien, mon ami, vous les avez eu vos culottes" La plaisanterie qui fait rire tous ses futurs ennemis n’est pas du goût du Général alors sans affectation. Selon Gabriel Julien Ouvrard, il fait cependant une cour appuyée à Thérésa en débitant mille folies n'en obtenant, selon Barras, que dédain qui le laisse sans espoir. Bonaparte se rabat sur sa meilleure amie Joséphine de Beauharnais (1763)-(1814), qui est encore très belle. Tallien et Barras sont les témoins des mariés et bien entendu Thérésa est présente à cette cérémonie. Le coup d'Etat du 18 Brumaire met un terme à la carrière publique de Thérésa. Bonaparte, qui l'a autrefois beaucoup aimée, ne l'admet pas à sa cour, ni sous le Consulat, ni sous l’Empire. Les rapports de Thérésa avec Bonaparte sont très tendus. Il écrit un jour à Joséphine : "Je te défends de voir madame Tallien, sous quelque prétexte que ce soit. Je n'admettrai aucune excuse. Si tu tiens à mon estime, ne transgresse jamais le présent ordre". Devenu empereur, il lui refuse une invitation pour le bal des Tuileries, au prétexte qu'elle avait eu 2ou3 maris et des enfants de tout le monde.

- le Prince de Chimay

Repoussée de la société officielle, madame Tallien devient alors l’amie de madame de Staël, chez qui elle fait la connaissance du prince de Chimay. Celui ci s'en éprend, et ils se marient le 9 Août (1805). François Joseph de Riquet de Caraman est Prince de Chimay depuis le 22 Août (1805). Officier dans un régiment de dragons au moment où éclate la Révolution Française, le jeune Prince de Chimay émigre avec ses frères. A la Restauration, le Prince obtient la croix de Saint Louis, et est nommé Colonel de cavalerie et Lieutenant de louveterie. En (1815), il est élu membre de la Chambre des Députés, par le département des Ardennes, et il y vote avec la minorité, mais il n’est pas réélu l'année suivante. Par la suite, il réside presque constamment dans les Pays Bas, dont le Roi le nomme, en (1820), membre de la 1ère Chambre des Etats Généraux, dans cette assemblée, il fait constamment preuve de la plus grande indépendance. Quoique possédant depuis (1804) les biens de la maison de Chimay, ce n’est qu'en (1824) que le Roi des Pays Bas lui confirme le titre de Prince.

Pendant leur 25 années de vie commune, le couple reçoit de nombreux musiciens, comme Daniel Auber, Rodolphe Kreutzer, Luigi Cherubini, Charles de Bériot ou Maria Malibran, à Paris, puis à Chimay, où Thérésa forme une petite cour. Cherubini composa sa Messe en fa dans ce château. Pour son épouse et pour leur passion commune pour la musique, le Prince de Chimay fit construire en son château un petit théâtre. Cette réalisation architecturale n'est pas la seule qui porte l'empreinte de Madame Tallien. Au bord du lac de Virelles, tout proche de Chimay, on trouve un petit pavillon qui porte son nom. A la fin des années (1980), le petit théâtre de Madame Tallien qui se trouve au château de Chimay servit de décor pour le tournage des 1ères séquences du film Le Maître de Musique de Gérard Corbiau avec José Van Dam.

Thérésa meurt au château de Chimay, le 15 Janvier (†1835), et son dernier époux est enterré avec elle sous la sacristie de l'église locale. Après avoir été pendant 40 ans le bienfaiteur de ce pays, le Prince François Joseph de Riquet de Caraman y fait fonder par testament un hospice pour les vieillards infirmes, et une salle d'asile pour les enfants pauvres. Parlant de madame Tallien dans ses mémoires, la Duchesse d'Abrantès évoque sa beauté animée et charmante, cet air qui réunit vivacité Française et volupté Espagnole. Madame Tallien a été représentée par le peintre Gérard, telle une déesse antique, couronnée de fleurs dans un décor théâtral. Ce tableau, resté dans sa descendance jusqu'en (2001), a été acheté par le musée Carnavalet (P 2738).

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