Jacques-Nicolas Billaud-Varenne

- Billaud Varenne

Jacques Nicolas Billaud puis Billaud Varenne, né à La Rochelle, le 23 Avril (1756), mort à Port au Prince, le 3 Juin (†1819) à 63 ans est un avocat et homme politique Français. Surnommé "le Tigre" en raison d'une perruque de couleur fauve qu'il aimait porter ou "le Rectiligne" à cause de sa rigueur morale], il fut un des principaux responsables de la Terreur et contribua à organiser le Gouvernement Révolutionnaire. Fils de Nicolas Billaud, avocat au Siège Présidial de La Rochelle, et de Henriette Suzanne Marchant, il est issu d'une famille de Notables de La Rochelle. Il a 2 frères cadets, Henri et Benjamin. Jacques-Nicolas étudie les lettres au collège de l'Incarnation de Niort, dont l'enseignement est fondé sur le latin mais fait la part belle, surtout en Rhétorique, à la Littérature Française des (XVIIème siècle) et (XVIIIème siècle), ainsi qu'à l'histoire Profane, puis la Philosophie à La Rochelle, établissement sans éclat tenu par des Séculiers depuis l'expulsion des Jésuites. Il fait ses études de droit à Poitiers et devient avocat en (1778). De retour à La Rochelle, où il doit succéder à son père, il se serait, selon la tradition, consacré à l'écriture Dramatique, sans grand succès, une comédie moralisante présentée à La Rochelle en (1781) aurait connu un échec retentissant.

En (1782), il quitte sa ville natale pour Paris où, faute de moyens, il finit par entrer à l'Institution de l'Oratoire. Admis à l'épreuve le 14 Mars (1783), il est envoyé le 5 Septembre suivant, au collège de Juilly, où il occupe les fonctions de Préfet de pension et assure la surveillance de la première chambre. Mal noté par le père Mérault de Bizy juge : "Il a beaucoup d'amour propre. Je ne le regarde que comme un mondain revêtu de l'habit de l'Oratoire, froidement régulier et honnête, qui a tâché de ne point se compromettre. Quoiqu'il soit judicieux dans sa conduite, à raison de son âge, de ce qu'il a été, de ce qu'il est, je ne le crois pas propre à l'Oratoire", il doit quitter l'Oratoire à la fin de l'année scolaire (1783)-(1784).

Il se fait inscrire au tableau des avocats au parlement de Paris à partir de (1785), mais travaille à des ouvrages contre le Clergé et le Gouvernement, il fait ainsi paraître anonymement en (1789) Le Dernier coup porté aux Préjugés et à la Superstition à Londres et Despotisme des Ministres de France, combattu par les droits de la nation, par les lois fondamentales, par les ordonnances, par les jurisprudences, enfin par les intérêts du Peuple et l'avantage personnel du Monarque à Amsterdam. Le 12 Septembre (1786), il épouse en l'église Saint André des Arts à Paris Anne Angélique Doye, fille naturelle d'un fermier général, et adjoint Varenne à son nom. Tout de suite après, le couple s'installe au 4ème étage du numéro 45 de la même rue Saint André des Arts, à 2 pas de la Cour du Commerce Saint André, là ou Danton habite et où Marat a son imprimerie, de laquelle il édite son journal: "L'Ami du Peuple". C'est aussi dans ce passage qu'une entrée discrète donne dans le Café Procope, où ils tiennent leurs réunions. Se voulant "écrivain philosophe", il publie plusieurs pamphlets Révolutionnaires contre le Clergé en (1789).

- à la Révolutionnaire

Dès la fin de (1789), Billaud Varenne dénonce "la révolution trahie" dans plusieurs opuscules. Dans Le Peintre politique, il fustige la loi Martiale et l'écart existant entre la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen et les décisions de la Constituante. En (1790), il publie un texte sur l'affaire des Suisses de Châteauvieux, également dénommée "affaire de Nancy", dans lequel il attaque violemment les Ministres. Cette même année, il adhère au club des Jacobins. Il embrasse avec ardeur les idées Révolutionnaires et se lie avec Danton, Marat et Robespierre. Il devient bientôt un des orateurs les plus véhéments du Club des Jacobins. ses prises de parole sont nombreuses. Il y attaque le Roi, la Cour et s'oppose avec Robespierre à la guerre souhaitée par Brissot et ses amis. Dans L'Acéphocratie ou le Gouvernement Fédératif, il demande la mise en place du Suffrage Universel et attaque le pouvoir Exécutif qu'il juge trop important.

Il propose en Juillet (1791) de remplacer la Monarchie par la République, et doit se cacher après avoir produit une brochure Républicaine. Contrairement à la légende c'est lui et non Robespierre qui engage le combat au club des Jacobins contre le Bellicisme Girondin. Ainsi le 5 Décembre (1791m), il prononce un long discours très remarqué à la société dont Robespierre qui montre d'abord le 28 Novembre des dispositions Bellicistes s'inspire le 11 Décembre. Il en prononce un second le 19 Décembre, puis un troisième le 30 Janvier (1792). Dans cette dernière allocution en particulier, il dénonce la guerre de Croisade, et se plaint de ce que les Girondins feignent de n'entendre dans ce débat que l'opinion de Robespierre, largement partagée par Danton, Anthoine, Camille Desmoulins, Doppet, Machenaud, Santerre, Panis "autant de zéros pour ces messieurs".

Après le 10 Août (1792), il est membre de la Commune de Paris. Nommé substitut du Procureur Pierre Louis Manuel, il participe aux sanglantes journées de Septembre (1792) au moins par la violence de ses discours. Il se rend à Châlons avec le titre de Commissaire de la Commune de Paris pour y surveiller les Généraux suspects. Il dénonce au passage la municipalité de la ville à l'Assemblée Législative qui n'en tiendra pas compte.

- à la Convention

Il est élu Député de Paris à la Convention, le 4ème avec 472 voix sur 767 votants. Il siège aux côtés des Montagnards. Ainsi, il demande l'application de la peine de Mort contre ceux qui introduiraient les ennemis sur le territoire National et défend Robespierre contre les attaques des Girondins. Au procès du Roi, il vote pour la Mort de Louis XVI 20 Janvier (1793) "dans les vingt quatre heures". En Avril (1793), il est envoyé en mission avec Sevestre en Bretagne afin de mater les révoltes Paysannes. Pour cela, il demande au Conseil exécutif des renforts qu'il n'obtiendra pas. Rentré à Paris, il s'oppose à la Commission des 12, puis demande en Juin (1793) la mise en accusation des députés Girondins. Le 23 Juin, il obtient l'abrogation de la loi Martiale. Cette année là, il publie également les Éléments du Républicanisme, dans lequel il expose le programme social des Montagnards. Au nom du droit à l'existence, et même si le système politique doit assurer à chacun la paisible jouissance de ses possessions, il estime que la répartition des biens entre les citoyens doit s'effectuer de la manière la plus égalitaire possible. Le 5 Septembre (1793), il soutient les revendications de la Commune de Paris portées par Hébert et Chaumette. Considérant qu'on ne fait pas de révolution avec des "demi mesures", il soutient la mise à l'ordre du jour de la Terreur. Ces prises de positions lui permettent d'être élu au Comité de Salut Public en même temps que Collot d'Herbois. Il est parallèlement élu Président de la Convention pour 2 semaines.

- Membre du Comité de salut public

Au Comité, Billaud est responsable avec Collot de la correspondance avec les représentants en mission. Farouche partisan du régime de la Terreur, il n'a de cesse de défendre le gouvernement Révolutionnaire. Le 28 Septembre (1793), il fait ainsi transformer le Tribunal Criminel Extraordinaire en Tribunal Révolutionnaire. Il fait voter la Loi du 14 Frimaire an II - 4 Décembre (1793) instituant une sorte de Constitution provisoire de la France jusqu'à la fin du Gouvernement Révolutionnaire, et créant le Bulletin des lois à destination des Communes. Le 1er Floréal an II - 20 Avril (1794), il présente devant la Convention un rapport sur les institutions civiles où il énonce l'idée d'un nouveau lien social "fondé sur un échange journalier de liens réciproques". Toutefois, le 29 Décembre (1793), il rejette la transformation du Comité de Salut Public en Comité de Gouvernement : "C'est la Convention qui doit Gouverner , déclare-t-il".

Jusqu'au Printemps (1794), Billaud Varenne ne se distingue pas fondamentalement de la politique menée par Robespierre, malgré quelques nuances. Il approuve ainsi l'élimination des Hébertistes puis des Indulgents dont il est l'un des adversaires les plus féroces. Dans son discours du 1er Floréal - 20 Avril (1794), il maintient son opposition à la guerre de conquête et de croisade, souhaitant la fin de la guerre aussitôt l'ennemi repoussé au delà des Frontières. Il y exprime également sa crainte du Césarisme qu'engendraient des victoires militaires trop nombreuses.

- Le 9 thermidor

Billaud Varenne se sépare cependant peu à peu de Robespierre, en qui il voit vraisemblablement un Dictateur en puissance. La création d'un bureau de police subordonné au Comité de Salut Public semble avoir heurté ce pourfendeur du pouvoir exécutif, tout comme la rédaction non collégiale de la fameuse loi du 22 Prairial. A partir de Messidor - début Juillet (1794), la rupture entre Billaud et le triumvirat Robespierre - Saint Just - Couthon est consommée. Toutefois, le 5 Thermidor - 24 Juillet (1794), il participe à la tentative de réconciliation organisée par Barère. Il tente d'amadouer Robespierre: "Nous sommes tes amis, nous avons toujours marché ensemble !" à l'issue de cette réunion, la crise semble commencer à se dissiper. Mais le 8 Thermidor, Robespierre prononce un discours devant la Convention dans lequel il se montre menaçant envers ses prétendus ennemis. Billaud Varenne, sans être cité, s'y sent visé et rejoint alors avec Collot d'Herbois la Conspiration préparant la chute du "tyran". Le soir aux Jacobins, Collot et lui sont violemment chassés de la tribune et du club par les membres Robespierristes.

Le lendemain 9 Thermidor, il prend la parole à la tribune après que Saint Just a été interrompu par Tallien. Il attaque Robespierre comme aspirant à la Dictature, dénonce ses affidés et demande leur élimination : "Je ne crois pas qu'il y ait ici un seul représentant qui voulût exister sous un tyran.". Plus tard dans la journée, après l'insurrection de la Commune en faveur des Robespierristes, il fait prendre des mesures afin d'organiser la défense de la Convention. Il est ainsi un des acteurs majeurs de la chute de l'Incorruptible qui est finalement Guillotiné le lendemain, 10 Thermidor an II - 28 Juillet (1794)

- Victime de la réaction

Dès le lendemain de l'exécution de Robespierre, Billaud s'oppose à toutes les mesures de réaction tandis que beaucoup lui prêtent l'intention de succéder à l'Incorruptible. Un mois seulement après la mort de Robespierre, Billaud quitte le Comité de Salut Public en compagnie de Collot et de Barère. Il va alors devenir une des cibles favorites des Thermidoriens réacteurs, notamment des anciens amis de Danton qui lui reprochent l'exécution du fameux Tribun. Avec ses anciens collègues des comités, notamment Barère, Collot d'Herbois et Vadier, il est dénoncé comme "complice de Robespierre", terroriste et criminel, d'abord par Lecointre le 11 Fructidor - 28 Août (1794), puis par le Dantoniste Legendre le 9 Brumaire an III - 30 Octobre (1794). Se sentant menacé et ayant gardé le silence pendant des semaines, il prend la parole le 13 Brumaire - 3 Novembre aux Jacobins, y dénonce les Thermidoriens et déclare à son propos et à celui de la Révolution : "Le lion n'est pas mort quand il sommeille, et à son réveil il extermine tous ses ennemis !" Ces déclarations provoquent la fureur de la Droite qui accuse Billaud d'avoir voulu exciter le peuple contre la Convention. Elle crée en Décembre (1794) une commission d'enquête chargée d'examiner sa conduite, ainsi que celles de Collot, Barère et Vadier. Les brochures demandant son arrestation et son exécution prolifèrent alors à Paris. Il est finalement décrété d'accusation le 12 Ventôse an III - 2 Mars (1795). Le 12 Germinal - 1er Avril (1795), il est Condamné à la Déportation en Guyane, en compagnie de Collot d'Herbois et de Barère, en vertu d'un décret. Après avoir manqué de peu d'être lynché pa/p>r des foules en colère au cours de son transfert, Billaud est déporté à Cayenne le 7 Prairial - 26 Mai (1795) et arrive en Guyane le 2 Thermidor - 20 Juillet.

- La déportation

Billaud Varenne reste emprisonné 4 années malgré la maladie. Il survit ainsi à son ancien collègue Collot d'Herbois qui meurt en (†1796). En (1797), sa femme, restée en France et avec laquelle il avait pourtant de bons contacts, obtient le divorce pour cause "d'absence du mari". Elle se remarie aussitôt avec un américain nommé Henry Johnson, puis en (1808), à un négociant, Cousin Duparc. Après le 18 Brumaire, Napoléon Bonaparte lui accorde la grâce, qu'il refuse. Il décide de rester en Guyane, même après l'occupation de la colonie par le Portugal en (1809). Il s'installe comme agriculteur et vit modestement, auprès de sa compagne, une Guadeloupéenne prénommée Brigitte mais qu'il appelle Virginie, elle ne décédera qu'en (†1874). Il se lie aussi d'amitié avec Victor Hugues, ancien gouverneur de la Guadeloupe. En (1816), avec la Restauration, il doit quitter Cayenne et s'installe à Haïti. Le Président Alexandre Pétion lui accorde une pension qu'il touche jusqu'à sa mort. Il meurt à Port au Prince en (†1819). Parmi ses dernières paroles, il déclara : "Mes ossements, du moins, reposeront sur une terre qui veut la Liberté ; mais j’entends la voix de la postérité qui m’accuse d’avoir trop ménagé le sang des tyrans d’Europe."

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